Il s’agit d’un travail entrepris le 1er janvier 1996 (jusqu’au 30 avril 2004). La question de notre relation au temps, à la mémoire et à l’utopie a été choisie comme point de départ d’une réflexion collective. Elle permet à l’artiste et à ses interlocuteurs d’approcher la valeur de communauté de tout acte culturel – l’art n’existant que par la volonté partagée d’en faire ou d’en voir.
La réalisation de ce projet passe par l’acceptation d’un geste simple : à l’aide d’un pluviomètre qui sera installé dans un jardin, sur un balcon, dans une jardinière, sur l’appui d’une fenêtre, collecter et mesurer toute les 24h l’eau de pluie pendant une période allant de une à quatre semaines. Une présence régulière doit être assurée pour permettre la collecte, la mesure et la transmission des données des quantités d’eau récupérées.
La fréquence et l’abondance aléatoires de la pluie nous donnent des indications de quantité qui une fois codifiées, à l’aide du système métrique adopté en 1795 pour tous les peuples et pour tous les temps, permettent par leurs qualités objectives de définir un modèle à partir du chaos. « C’est également la mise à l’épreuve d’une règle dont l’application suffit à prouver ou bien que le réel ne s’y laisse pas réduire ou bien au contraire que la règle est moins arbitraire qu’il n’y paraît et qu’elle a un fondement dans la nature » (A. Moeglin-Delcroix, Esthétique d’un livre d’artiste)
Chaque jour de pluie, je réalise un dessin où la quantité d’eau récoltée est reportée à l’aquarelle bleue dans une case de 10cm de coté subdivisée en 100carrés à raison d’un litre par carré et subdivision du litre en quart, demi, trois quart sur le même principe. Le dessin s’inscrit de la gauche vers la droite et de bas en haut, reprenant comme point de départ pour les jours de pluie suivant la fin du dessin précédent et ce du premier au dernier jour du mois pour chaque lieu. La date du jour, le nombre de litres, le nom du lieu de récolte sont inscrits sous chaque dessin.
L’ensemble de ces dessins codés peints à l’aquarelle bleue, les cartes géographiques des lieux de récolte, les photos d’inondations et d’événements liés à la pluie, les informations concernant l’eau, les noms des participants, les jours sans pluie… sont édités sous la forme d’un livre d’artiste.