EXPOSITION
DU 18 NOV. 2012 AU 30 MARS 2013

Le Pommier et le Douglas

Marie Preston

Maison du Patrimoine Oral / Abbaye de Corbigny / chez Treize à l'invitation du Commissariat

Avec Marion Campay, Laurence Coudereau, Keith et Linda Dale, Caroline Darroux, Thérèse Fichot, Christine et Louis Goulois, Just et Monique Lucazeau, Madeleine Petitimbert et Régine Perruchot

Un projet du Parc Saint Léger – Hors les murs
avec la collaboration des centres sociaux de Corbigny, Montsauche et Château-Chinon et la Maison du Patrimoine Oral et en partenariat avec L’Agence Culturelle du Parc du Morvan
Commissariat : Céline Poulin
Scénographie : Jean-Philippe Darini & Marie Preston

L’exposition de Marie Preston est à l’image du processus de production qui l’a construite : un voyage qui se module et se ramifie, un déplacement dans des réalités différentes, individuelles ou collectives, une histoire transmise de bouches à oreilles, une histoire de croisements de regards.
Une œuvre parfois peut naître d’un hasard, qui advint ici dès l’origine, car l’invitation faite à Marie Preston de venir travailler dans le Morvan était inconsciente de l’histoire de sa famille dans cette région. Et on peut le dire, cela tombait bien.
En effet, comme elle le dit souvent, si Marie Preston travaille en collaboration pour co-créer des projets et des oeuvres, l’artiste ne va pas puiser chez l’autre simplement sa matière ou son inspiration. Elle amène quelque chose d’elle-même — un savoir-faire par exemple quand elle décide d’aller tricoter du wax avec les personnes de l’association des femmes maliennes à Montreuil ou une question quand elle propose à un groupe de volontaires de venir fouiller avec elle les archives du Jardin d’agronomie tropical dans le bois de Vincennes. En arrivant dans le Morvan en juin 2011, Marie Preston est venue avec son histoire, à la fois jeune artiste vivant à Paris et interrogeant le lien entre anthropologie et pratique artistique, mais aussi petite-fille de William Angulo-Preston, américain excentrique venu épouser une morvandelle Geneviève Pignot sur les conseils d’un ami curé.
Grâce à la Maison du Patrimoine Oral, et à une rencontre avec Caroline Darroux, Marie Preston a pu bénéficier d’une formation au collectage, forme d’interview pratiquée en ethnographie où il s’agit de « traiter l’homme ordinaire non plus comme un objet à observer, mais comme un informateur, et par définition, comme un informateur mieux informé que le sociologue qui l’interroge », selon les termes de Daniel Bertaux1. Habitée par une démarche tout autant scientifique que personnelle, Marie Preston est donc allée à la rencontre de personnes ayant connu son arrière-grand-père et son arrière-grand-mère.
Car la construction d’une légende familiale n’est pas l’objectif de Marie Preston, il s’agit plus généralement d’une démarche d’interrogation du territoire se centrant sur une histoire aussi commune qu’individuelle. Rencontrer des personnes vivant dans le Morvan pour produire ensemble une mémoire collective et intime de ce territoire afin de comprendre ce qu’on appelle la ruralité, la relation à l’altérité (le grand Autre : la femme, l’étranger, le progrès…), l’hybridité… tel était le chantier large et très ouvert auquel elle souhaitait s’atteler. S’atteler, du latin protelare, « conduire jusqu’à, faire parvenir », mais aussi « s’attacher, créer des liens ».

Ainsi, grâce aux centres sociaux de Corbigny, Montsauche-les-Settons et Château-Chinon, Marie Preston est allée à la rencontre de Paul Camuzat, Laurence Coudereau, Keith et Linda Dale, Thérèse Fichot, Christine et Louis Goulois, Monique et Just Lucazeau, Madeleine Petitimbert et Régine Perruchot. Mêlant leurs savoir-faire et les récits de vie de chacun, ils ont réfléchi ensemble à l’histoire qu’ils avaient envie de raconter, seuls ou avec les autres et à la forme que cela allait prendre. Ainsi Régine Perruchot, l’initiatrice de l’atelier Patois à Montsauche, a-t-elle écrit une chanson que Marie Preston a brodée sur une robe. Les acteurs de l’atelier Partage ont raconté l’histoire de Soeur Monique qu’ils ont bien connue et dont un film présente la légende. Mme Fichot, rencontrée par l’intermédiaire du portage de repas du centre de Corbigny a quant à elle conté à Marie Preston son passé à la ferme et le futur de celle-ci avec son fils installé en bio qui accueille des vaches Highland Cattle. C’est d’ailleurs le poil de ces vaches qui relie les carrés de laine tricotés par Madeleine Petitimbert à la demande de Marie Preston. Également Just et Monique ont narré les retrouvailles avec les parents et les frères de Just, enfant de l’assistance, photos à l’appui, faisant vivre par la parole ce moment typique d’un Morvan marqué par les “nourrices”. Sans oublier Keith et Linda Dale, apprenant le français au centre social de Château-Chinon, qui ont mis en scène l’évolution de leur histoire entre Boston et Planchez. Et puis pour commencer par la fin, le premier objet de cette histoire, construit avec Caroline Darroux, autour de sa thèse sur les « vieilles femmes salies », polyptyque photographique de la région et surtout de la maison d’Henriette, l’une de ces femmes rencontrées par Caroline.

Ce qu’ont produit Marie Preston et ces personnes avec qui elle a travaillé, dépasse la question fondamentale de la juste distance, telle qu’elle se pose en anthropologie : l’anthropologue se demande quelle connaissance objective il peut amener sur un objet, un monde, dont il fait lui-même partie. Ici, ce qui nous est donné à voir et à écouter avec « Le Pommier et le Douglas », c’est un savoir du Morvan, réunissant le subjectif et l’objectif, s’incarnant dans une polyphonie d’images et d’objets, car comme aurait pu le dire Jacques Lacan : « le savoir vient de l’autre et la jouissance est du côté de la chose ».

Céline Poulin

1- site de la Maison du Patrimoine Oral

AUTOUR DE L’EXPOSITION

Pour chaque vernissage, Marie Preston propose deux performances : Vieille femme salie avec Caroline Darroux et Nout patouais avec Marion Campay et Régine Perruchot.

INFOS PRATIQUES

Exposition à la Maison du Patrimoine Oral du 18 novembre au 16 décembre 2012
Vernissage le 17 novembre à 17h
Le Bourg 71550 Anost

Exposition à l’Abbaye de Corbigny du 12 janvier au 16 février 2013
Vernissage le 11 janvier 2013 à 18h30
6 rue de l’Abbaye 58800 Corbigny

Exposition chez Treize à l’invitation du Commissariat du 2 au 30 mars 2013
Vernissage le 1er mars 2013 à 18h30
24 rue Moret 75011 Paris

DOCUMENTS À TÉLÉCHARGER