À partir de la configuration du musée nouvellement rénové, le parti pris de cette exposition est de disséminer des œuvres contemporaines dans le Musée d’Art et d’Histoire Romain Rolland et de « jouer » des rapprochements entre patrimoine et contemporanéité. Les œuvres installées aux différents étages du musée se présentent comme une invitation à découvrir l’art contemporain au sein des espaces traditionnels d’exposition du musée.
« De(s)figuration(s) » se veut une incursion auprès des pratiques artistiques contemporaines dont les positionnements, parfois antinomiques, reflètent aussi bien une quête identitaire aux connotations sociologiques, qu’une représentation de la figure humaine proche du genre classique du portrait.
L’objet de cette exposition s’est défini par le contenu-même de la collection beaux-arts du musée, riche en représentations figurées, d’époques et de genres différents : portraits officiels, voire caricaturaux de la donation François Mitterrand, buste d’Herminie Bigé, épouse Collard, réalisé par Jules Franceschi, portrait de petit format et de facture précieuse (Portrait du marquis de Chenerilles) du peintre et du théoricien Roger de Piles, figures de l’iconographie religieuse…
Progressivement, s’est imposée une sélection d’artistes qui ont utilisé ou suggéré la figure comme prétexte à un travail formel ou critique. Autant d’identités conjuguées au sein d’une même exposition dont le parcours prend en compte, autant que faire se peut, l’accrochage des salles permanentes et la proximité formelle et contextuelle des œuvres entre elles.
Le hall d’accueil, premier espace donné à voir au visiteur, est occupé par la pièce d’Ernest T : Les bobines (1999), installée à proximité de la donation François Mitterrand. Le sens de la dérision et du regard critique de l’artiste sur le monde de l’art et ses acteurs, côtoie les peintures, souvent caricaturales, de la donation Mitterrand. Sur un même niveau, la série photographique de Jacques Fournel présente une galerie de portraits dans laquelle l’artiste se représente, non sans ironie, au travers des autoportraits célèbres de l’histoire de la peinture. La visite du premier niveau est ponctuée par un diptyque photographique de Marie-Jo Lafontaine et d’une installation de Christian Boltanski. Bien que leurs productions soient singulièrement différentes, l’identité est au cœur de leurs préoccupations artistiques ; dans une attitude introspective et méditative sur la vie pour l’une, dans un rapport à l’enfance et à la mémoire chez l’autre. Au second niveau, les modèles figés, débarrassés de toute expressivité des grands portrait peints de Djamel Tatah, répondent aux petites figures féminines sculptées et émergeant du socle de Stephan Balkenhol. La radicalité du travail de Pascal Convert qui évite toute représentation figurée pour son Autoportrait, avoisine les copies de peintures anciennes dessinées sur Télécran de Stéphane Lallemand. D’autres œuvres poursuivent ce questionnement : dessin de Philippe Favier, photographies de Aziz+Cucher, John Hilliard et Les Levine, Cédérom de Michel Gerson. Autant de singularités « muséographiées » qui proposent des « portraits croisés » tant dans leurs époques que dans les médiums utilisés.
Valérie Pugin